Hygiène et médecine des enfants

L’enfant emmailloté

Jusqu’au XVIIIe siècle, le petit était emmailloté et attaché au berceau étroit dans lequel il était déposé. On pouvait ainsi le bercer facilement et le laisser sans surveillance sans qu’il risquât de se blesser ; on cherchait également ainsi à le façonner afin que ses jambes fussent bien droites.
Dans les familles les plus humbles, beaucoup de nourrissons dormaient dans le lit de leurs parents et mouraient étouffés, malgré l’interdiction régulièrement rappelée par les curés. Certains historiens ont pensé qu’il s’agissait peut-être d’une forme d’infanticide, pratiquée en secret, sans réelle conscience du crime commis.

L’enfant n’était changé qu’une à deux fois par jour ; l’urine étant réputée avoir des vertus médicales, on séchait souvent les couches avant de les remettre. Le tout petit restait dans sa saleté : on lui laissait ses croûtes de lait ; on ne lui nettoyait pas la tête : la crasse était censée embellir les cheveux et protéger la fontanelle.

Une évolution nette dans les années 1760-1770

Avis au peuple sur sa santé. Quatrième édition originale augmentée / Samuel Tissot.- Paris : Pierre François Didot, 1770 (Poitiers, Bibliothèques universitaires, Fonds ancien, Méd. 2174)

Ces habitudes furent peu à peu remises en cause au XVIIIsiècle, de manière particulièrement forte autour de 1760-1770. Les médecins, en particulier André Tissot, les chirurgiens, les sages-femmes, désormais très attachés à l’hygiène, condamnèrent les pratiques des siècles précédents. Jean-Jacques Rousseau recommandait alors de déposer l’enfant dans un berceau plus grand et de ne plus utiliser le maillot, ce qui permettait non seulement de laisser les membres en liberté, mais aussi de laver et de changer le nourrisson plus facilement. L’exercice physique était lui aussi encouragé.
Perdant un peu de leur liberté au bénéfice de leurs enfants, les mères purent avoir des rapports différents avec eux. Les corps de petits étant désormais sans entraves, les mères pouvaient entrer en contact physique avec eux et échanger caresses et sourires.

Mais seuls les milieux aisés suivirent rapidement ces recommandations. Dans les campagnes et les milieux les moins favorisés, dans lesquelles les femmes, travaillant beaucoup, ne pouvaient surveiller en permanence leurs enfants, les changements se firent au milieu du XIXsiècle seulement.

L’invention de la pédiatrie

Médecine domestique. Troisième édition, revue, corrigée et considérablement augmentée / William Buchan ; trad. par J. D. Duplanil.- Paris : Jacques-François Froullé, 1783 (Poitiers, Bibliothèques universitaires, Fonds ancien, Méd. 2690)

Durant la seconde partie du XVIIIsiècle, on découvrit progressivement la spécificité de l’enfant. De nombreuses maladies infantiles, comme la coqueluche, la scarlatine, la varicelle, la variole, les oreillons, etc., étaient alors décrites, mais souvent mal soignées. On pensait qu’elles étaient plus difficiles à traiter que celles des adultes. En effet, les médecins s’occupaient avant tout de théorie : pour identifier le mal, ils n’auscultaient pas, mais interrogeaient le patient… et les enfants ne parlent pas avant deux à trois ans, puis peinent à décrire précisément ce qu’ils ressentent !
Les choses évoluèrent peu à peu, comme le soulignait William Buchan, qui proposa d’interroger l’entourage de l’enfant pour mieux cerner ce dont il souffrait. De plus en plus de parents se souciaient en effet beaucoup de la santé de leurs enfants, dont la mort était vécue comme un drame.

Mais la spécialité de la pédiatrie naquit au XIXsiècle seulement : le terme apparut en 1872.

Anne-Sophie Traineau-Durozoy

Recherche

Menu principal

Haut de page