L’enfance au Moyen Âge
Longtemps, l’idée d’un certain mépris de l’enfance est restée attachée à l’époque médiévale. Or les sources montrent que l’enfance est sacrée dans l’Occident chrétien médiéval. À l’image de l’Enfant Jésus, les enfants incarnaient l’innocence et la pureté. Ils étaient considérés comme des dons de Dieu et jouissaient d’une attention considérable.
L’âge de l’innocence
Le but de l’enfance était de préparer à la vie adulte. De nombreux écrits pédagogiques conseillaient parents et précepteurs. Les différents âges de la vie y étaient souvent décrits. L’enfance y était couramment divisée en trois ou quatre « étapes » : l’infantia (de la naissance à 7 ans), la pueritia (de 7 à 14 ans), l’adolescentia (de 14 ans à l’âge adulte) et, parfois, la juventus (la jeunesse, de 21 à 28 ans).
La naissance
Les traités se penchent sur le fœtus, considéré comme un être avec des émotions et des droits. À la naissance, l’enfant était accueilli avec le plus grand soin et rapidement baptisé car la peur de la mortalité infantile était forte (manque d’hygiène, malnutrition, maladies, accidents, etc.).

Nativité, l’Enfant Jésus emmailloté (Poitiers, Notre-Dame-la-Grande, façade ; cliché CESCM-Brouard 1995/Base Romane)
Le lait maternel était pensé comme le produit d’une « déalbation » du sang menstruel qui blanchit et devient du lait. L’enfant, « modelable comme de la cire », garderait l’empreinte de celle qui l’allaite, ses vertus comme ses vices. La nourrice devait être choisie sur ses mœurs et sur son apparence.

Vierge en majesté allaitant l’Enfant Jésus (Livre d’heures à l’usage de Saintes.- Vers 1430 ; Poitiers, Médiathèque François-Mitterrand, ms. 47(308), fol. 21)
L’éducation
Si la grande majorité des enfants vivait à la campagne, l’enfance noble est la mieux connue. L’archéologie, l’iconographie ou les récits de miracles peuvent néanmoins nous donner des indices. Pour tous, l’éducation devait se faire dès l’âge le plus tendre, pro verbo et exemplo, « par la parole et les gestes ». Les premiers apprentissages, marche et parole, se faisaient dans le cadre familial, suivis de ceux des bonnes manières et de la foi, souvent assurés par la mère.

L’Enfant Jésus apprenant à marcher avec un trotteur ou youpala (Livre d’heures à l’usage de Poitiers.- XVe siècle ; Poitiers, Médiathèque François-Mitterrand, ms. 1097, fol. 4v)
Vers cinq ou six ans, les nobles étaient confiés à un précepteur et recevaient un enseignement correspondant à leur rang, à la fois moral – manières, lecture, histoire, langues et politique – et physique : manier l’arc, monter à cheval ou encore l’art de la fauconnerie. Le petit paysan était très tôt confronté aux responsabilités. Aux plus jeunes, on confiait les tâches non dangereuses ne risquant pas de gêner leur croissance : nourrir la volaille, cueillir les légumes, etc.

Jeux d’enfants (Livre d’heures à l’usage de Poitiers.- 1506 ; Poitiers, Médiathèque François-Mitterrand, DR 25, fol. 10)
Les jeux et jouets des enfants n’ont pas beaucoup évolué depuis le Moyen Âge, qui connaissait déjà hochet, billes, ballon, dinette, petites épées, etc. La qualité différait selon les milieux (poupée sculptée ou poupée de paille). Les jouets étaient souvent des reproductions miniatures des instruments utilisés par les parents, afin d’éduquer les enfants à leur futur métier.
L’école
L’école est attestée dès le VIe siècle mais sa fréquentation n’était pas généralisée, malgré les décrets tels que le capitulaire de Charlemagne, l’Admonitio generalis (789), ouvrant les écoles aux fils d’hommes libres comme à ceux des serfs. Avec l’urbanisation des XIIe et XIIIe siècles, les choses évoluèrent sous l’impulsion des marchands désirant que leurs enfants fussent formés à l’écriture, à la lecture et au calcul afin de prendre leur succession. Des écoles existaient à la campagne, pour les enfants de paysans. Mais elles restèrent longtemps peu fréquentées.
Après l’enfance
Autour de 12 ans, venait le moment de la « crise de l’adolescence », l’âge des tentations et de l’indiscipline… Vers 14 ans, le futur adulte pouvait entrer à l’université ou en apprentissage pour ceux qui ne pouvaient apprendre le métier avec leurs parents. Placés chez un commerçant pendant quelques années, garçons comme filles recevaient la formation de leur futur métier. L’âge de 15 ans marquait la fin de l’enfance.
Lucie Blanchard